Après un premier opus sorti il y a une dizaine d’années qui m’avait fait bavé d’envie tellement il était beau et frustré parce que je n’avais pas un PC assez puissant pour espérer le faire tourner et un second opus décevant d’après les critiques qui m’avait donc coupé l’envie de m’y aventurer, la presse spécialisée a encensé ce nouveau Far Cry nous invitant une nouvelle fois à arpenter une île et sa jungle et y affronter des hordes de pirates. C’est parti pour la Voie du Guerrier !
Aloha !
Vous incarnez Jason Brody, jeune fougueux, amateur de sport extrême, en plein tour du monde avec sa copine et sa bande de potes fortunés. Jamais froid aux yeux ou frileux de partir à l’aventure, ils décident de se faire un plan chute libre au-dessus d’une petite île perdue. Un trip qui tourne au cauchemar quand ils découvrent que l’île est loin d’être inhabitée. Une organisation de pirates a en effet décidé de profiter de ce coin touristique branché chez les jeunes fils à papa pour faire fleurir une organisation spécialisée dans le rapt. Quelques vidéos envoyés à la famille, une rançon empochée et les captifs vendus en esclavage, et hop, double pactole !
Se sachant bien vite mal embarqué, Jason et son frère tentent de s’évader mais ce dernier se fait tuer par Vaas, le chef des pirates du coin, un fou furieux charismatique et déjanté à qui vous allez devoir reprendre vos amis… autant dire que la tâche va être ardue, et n’est envisageable que grâce à l’aide de la tribu de l’île, les Rakyat, qui va vous initier à la Voie du Guerrier, en ne faisant qu’un avec la jungle, en domptant ses bêtes et en obtenant la Force de se battre contre tous.
Une histoire de sauvetage teintée de vengeance plutôt simple et sans fioriture puisant toute sa force dans le contexte. Cette île magnifique et sauvage, où le danger est permanent par ses habitants comme par sa faune. Une île où l’aspect mystique de notre évolution en tant que guerrier prendra tout son sens. De jeune citadins aventureux, on deviendra peu à peu un combattant implacable.
Et si cet aspect émotionnel est aussi efficace, c’est grâce à des personnages extrêmement attachants et habités, qu’il s’agisse du héros ou de tous les PNJ croisés.
Chaque cinématique est l’occasion d’assister au magnifique jeu d’acteur et de doublage effectué pour le jeu, que ce soit en VO ou en VF, comparable en qualité à un The Last of Us, c’est pour dire. Les émotions sont palpables, les acteurs investis de leur rôle, tout est parfaitement crédible et efficace. Bon, par contre, soyons honnête, vis à vis de la multitude de commentaires positifs, j’ai été un peu déçu en terme de quantité, dans le sens où au final, Vaas et Hoyt, les deux figures importantes des méchants sont assez peu présents. Et la fascination qui naît en nous envers Vaas se retrouve un peu oublié à un moment donné et me semble sous-exploité. Ça reste très bon, mais avec une telle qualité dans le personnage, je pense qu’on aurait pu avoir encore plus d’implication dans l’histoire générale et le parcours de Jason.
Visuellement, l’île est tout simplement splendide. Des paysages à perte de vue, quasiment sans aucun effet de brouillard (Assassin’s Creed 3, prends-en de la graine et va te cacher ! Bouuuh ! è_é), des temps de chargement inexistants hormis lors des voyages rapides, et un cycle jour/nuit et des intempéries plutôt crédibles. Ce résultat bluffant repose en partie sur des petites astuces qu’on peut s’amuser à déceler, comme des arbres qui passent en 2D une fois qu’on en est assez éloigné, ou encore le ciel qui n’évolue pas tant que vous le regardez en plein écran pour ne pas avoir à créer chaque nuage et à lui assigner des calculs de mouvements. Ce n’est qu’à chaque fois qu’on détourne le regard que la lumière évolue, et hop, le ciel a changé dans un petit tour de magie bougrement efficace et bien senti. Une astuce bien plus intelligente en tout cas que le brouillard épais trop souvent utilisé dans les jeux.
De plus, l’île fourmille de lieux qui donnent envie de fouiller : ruines antiques, baraquements, lieux civilisés, criques, falaises tortueuses, montagnes immenses, épaves de bateau, ou encore des restes d’une vieille guerre comme des avions écrasés et autres bunkers… tout pour ne pas se lasser.
L’ambiance musicale est assez variée pour ne jamais en être blasé, tapant dans de nombreux registres : musique techno, tambours, hip hop, musique des îles, ou même un passage génial vers la fin du jeu où l’action est accompagnée de la chevauchée des Valkyries.
Mais cet univers si brillamment mis en valeur m’a été gâché plusieurs fois par un tout petit détail à la con que je tiens à souligner tout de même. Messieurs-Dames les développeurs, quand on est en plein dans une scène d’action intense, un combat contre un boss ou une cinématique, et qu’une micro coupure internet interrompt votre box une petite seconde, pourquoi afficher plusieurs messages qui mettent le jeu en pause et obligent à attendre plusieurs secondes avant de reprendre, alors même que la connexion internet n’a aucun intérêt dans le mode solo ?! J’ai fini par jouer hors connexion, après plusieurs gros agacements, mais pour ça, il fallait sortir du jeu et le relancer et donc perdre tout sentiment d’immersion alors que j’étais à fond dedans ! Donc, je sais, c’est un micro-détail, mais franchement, si vous commencez à avoir ces messages, mettez votre console en hors connexion tout de suite, sans attendre de vous faire pourrir votre groove!^^ »

Découvrir un pylône de communication ne suffira pas, il faudra grimper tout en haut malgré leur état parfois avancé de délabrement pour en prendre le contrôle.
Fais ce qu’il te plaît…
Monde ouvert… ah ce terme qui fait fantasmer un grand nombre de joueurs et qui m’a toujours refroidi au plus haut point. Je fais en effet partie des gamers qui préfèrent avoir une histoire dirigée et rythmée plutôt qu’un monde ouvert bac à sable. Mais pour une fois, je dois bien avouer que le style de jeu peut être très bien géré. C’est rare, mais Far Cry est un bon exemple de réussite dans le rythme (Red Dead Redemption est un des rares jeux ouverts qui a trouvé grâce à mes yeux).
Les quêtes annexes sont nombreuses sans être des centaines, on peut aller où on veut pour visiter ou collecter des objets sans pour autant être obligé d’y passer des plombes, on peut marcher, rouler, voler ou tout simplement utiliser en une seconde des voyages rapides, et surtout, le fil conducteur de la trame principale arrive à garder de la consistance et de la crédibilité malgré nos écarts. Car c’est bien là ce qui me pose le plus de soucis dans un monde ouvert : la narration entrecoupée. Mais les créateurs de Far Cry 3 arrivent à distiller quelques lignes de dialogues par ci par là pour nous rappeler les enjeux et conserver l’ambiance. Pas de frustration donc à avancer à son ryhtme et explorer ce que bon nous semble.
Et pour explorer, on explore… L’île étant parsemée de pylônes de communication, on y grimpera révélant la carte au fur et à mesure et les choses à faire tout autour. Les avant-postes dévoilés devront alors être épurés de leurs gardes pour assainir la zone et agrandir le territoire des Rakyat. Pour ce faire, la stratégie est totalement libre. On peut choisir l’infiltration, supprimant les sentinelles isolées au sniper silencieux, puis se glisser à l’intérieur du camp, tuant au couteau sans un bruit, et désactivant les alarmes pour prévenir toute arrivée de renfort, mais on peut tout autant tirer dans le tas au lance-roquette, et affronter les vagues de renfort motorisé si on s’y sent prêt. Dans un cas comme dans l’autre, le level design des lieux est toujours bien pensé permettant des planques, des points de vue en hauteur, des possibilités pour avancer à couvert, etc… la polyvalence est aussi remarquable que l’efficacité avec laquelle elle est mise en œuvre.
Chaque avant-poste vaincu ouvre l’accès à des missions secondaires. Des contrats à exécuter au couteau, des animaux à chasser avec des armes imposées, des défis divers, ou des petites histoires annexes parmi le peuple. Et si de nombreuses armes peuvent être achetées, la plupart sont offertes au fur et à mesure de votre progression. Un peu dommage d’ailleurs car la sensation d’amateurisme de Jason avec une arme est trop vite remplacée par des armes puissantes en pagaille et des compétences nombreuses et fichtrement efficaces. J’aurais préféré des armes un peu plus dures à obtenir.
Le gameplay est classique et efficace malgré un ou deux raccourcis de boutons qui pourront parfois agacer en voulant faire une action et en s’emmêlant les pinceaux, mais rien de grave.

le tatouage sur le bras de Jason évolue au fur et à mesure de l’aventure, incarnant les compétences qu’il apprend sur la Voie du Guerrier.
Et enfin les moyens de locomotions qui sont nombreux et standards au début avec voitures, camions, bateaux, jet-ski (à noter l’IA catastrophique des ennemis au volant qui fonceront plus d’une fois directement dans l’océan et se noieront dans leur 4×4 alors qu’ils ont des comportements corrects sur terre), mais c’est dans le ciel que les sensations seront géniales. Les deltaplanes que l’on trouve un peu partout en montagne vous font planer avec une sérénité jouissive au-dessus d’une île à perte de vue, fourmillant de détails, accompagnés par les aigles, un vrai moment de bonheur. Et quand vous débloquerez la wingsuit, je vous raconte pas!^^
Un jeu qui assume…
Je tiens à aborder un point qui m’a fait extrêmement plaisir : la notion de jeu classé 18+.
Pour de trop nombreux jeux, le fait de passer dans la catégorie jeux pour adultes est l’occasion de faire jaillir de l’hémoglobine, bien sûr, mais surtout de taper dans le sadisme un peu facile avec des images de tortures faites pour choquer, ou de la nudité aguicheuse… et si la provocation marchait bien il y a quelques années grâce au phénomène de nouveauté, l’effet tombe de plus en plus souvent dans une banalité absolue. Les tortures les plus ignobles et les femmes à poil lascives à souhait nous font à peine sourciller, blasés que nous sommes. Far Cry 3 préfère conserver un réalisme certain et c’est diablement plus efficace.
SPOIL/Qui dit groupe de jeunes gens captifs dont deux jolies filles, dit forcément abus sexuels filmés de façon provoc mais croustillantes pour émoustiller l’ado mâle ? Eh bien non, c’est un garçon du groupe qui sera le seul à avoir été violé et humilié (on ne voit pas d’images de sexe, mais ils auraient limite pu, ça m’aurait paru justifié.

La Voie du Guerrier et son côté retour bestial à la nature s’incarne en un désir certain en la présence de Citra, la Chef des Rakyat
Ça ne consolerait pas le jeune homme de son infortune, mais ça fait du bien de ne pas voir la femme une fois de plus désignée comme la cible évidente en matière de domination sexuelle, et ça remplace tout début d’excitation un brin malsain, par une vraie gêne du joueur face à des actes graves et insoutenables.
Je pense également à une des deux fins du jeu qui mérite d’être vu au moins sur youtube si vous ne la débloquez pas dans votre partie, montrant une scène de sexe qui fasse vraiment vraie ! Pas un fantasme visuel entre glamour et porno soft, non, un vrai ébat entre deux corps, né d’une pulsion et d’une libération de soi, à tendance franchement bestiale et profondément humaine. J’ai adoré le fait que cette scène existe dans un jeu vidéo ! C’est à mes yeux encore un pas en avant dans l’appropriation du jeu vidéo comme moyen d’expression de sensations fortes./SPOIL
A plusieurs, c’est mieux ?
Je ne parlerai pas du mode multijoueur en ligne, qui est apparemment sympathique, mais sans plus, car je ne m’y suis pas aventuré, stoppé dans mon entrain par un mode coopération franchement mal géré. Pourtant tout n’est pas à jeter.
Une petite histoire met en scène 4 nouveaux personnages sur l’île dont les infos se recoupent avec le solo. Des chapitres assez longs et variés apportent quelques situations sympas : fusillades, conduite, sniper, pose de bombe, défense de zone, etc… mais le problème vient du level design catastrophiquement quelconque et peu permissif. Là où Ubisoft Montréal avait parfaitement réussi à relever le défi dans un monde ouvert, on oublie tout dans un monde fermé en coop. Ne reste que des enfilades de couloirs et des vagues d’ennemis totalement bourrines et sans aucune ingéniosité. A part de très rares et courtes exceptions, impossible de faire la moindre infiltration à plusieurs, ou de tenter des stratégies d’attaque… le champ de bataille devient immanquablement un joyeux bordel en quelques secondes où il ne nous reste qu’à tirer dans le tas en espérant que ça passe. Une déception en grand partie attribuable au fait, il me semble, que le multijoueur est l’oeuvre d’un autre studio que le solo, et qui se fera donc bien vite oublier.
Far cry 3 est donc (en solo) une bien belle aventure, palpitante et prenant aux tripes grâce à une immersion captivante. Traquer les animaux dans la jungle, combattre les pirates et affronter la folie incarnée dans les visages ennemis et leurs dialogues délicieux restera un souvenir important du jeu vidéo, une marque de qualité de l’année 2012 à faire absolument.
THE trailer cinématique qui fait grave envie de découvrir l’univers du jeu :
et le trailer gameplay qui fait grave envie aussi^^ :
