Kid I Luck – tome 1 de Yuko Osada
L’humour comme moyen de guérison
Kid I Luck est l’un des derniers seinen que l’éditeur Ki-oon a mis en avant. Ce manga est l’oeuvre de Yuko Osada qui a déjà été publié chez cet éditeur avec l’excellent Run Day Burst. Et rien que pour ça, ça peut valoir le coup de suivre cette série. En plus, elle a l’immense avantage de ne compter que 3 tomes.
Ce titre s’annonce comme différent de la production actuelle, du fait de son thème principal. Mais cela fonctionne-t-il ?
Kid I Luck – tome 1 de Yuko Osada est édité par Ki-oon et est disponible à la vente depuis le 25 septembre 2014.
Résumé de Kid I Luck 1 chez Ki-oon
Résumé de l’éditeur :
Kinjiro Yaoi est la terreur de son lycée. Bagarreur invétéré et incorrigible tête brûlée, il est du genre à laisser ses poings s’exprimer avec générosité à la moindre occasion. À l’extrême opposé, son amie d’enfance, Kuriko, est la douceur incarnée. Mais peu avant ses 18 ans, une tragédie touche la jeune fille, qui est agressée au retour du lycée…
Traumatisée, elle n’a plus la force de retourner en cours et vit enfermée chez elle, complètement coupée du monde extérieur… Kinjiro, de son côté, est rongé par la culpabilité. Lui qui n’a pas été présent pour défendre son amie cherche inlassablement un moyen de la sortir de sa déprime. Sa décision est prise : à l’image de ces comiques professionnels qui faisaient le bonheur de Kuriko avant son agression, il deviendra lui aussi un champion du rire et consacrera son existence à redonner le sourire à son amie !
Mission loin d’être évidente pour notre voyou au grand cœur… qui est doté d’un sens de l’humour catastrophique !
Yuko Osada cet auteur plein d’originalité
Yuko Osada est un auteur que j’ai connu avec l’excellent mais trop méconnu Run Day Burst. A l’époque de la sortie de ce manga, j’avais eu une affection toute particulière pour ce titre barré, mais pourtant injustement trop méconnu.
Du coup, lorsque j’ai appris la sortie d’un autre de ces titres, je m’y suis intéressé.
Dans Kid I Luck, on change radicalement d’ambiance. Exit la course automobile endiablée, place à un titre plus terre-à-terre et urbain. Pourtant, il y a toujours cette touche Osada, avec cette énergie qui se dégage des pages, alors que le fond de l’histoire n’est pas forcément très gaie.
Et pour cause. On suit le personnage de Kinjiro Yaoi, appelé aussi Yaokin, un lycéen bagarreur, qui adore en venir aux mains avec d’autres lycéens et qui est réputé pour ça. Kuriko est son ami d’enfance, et elle est très importante pour le garçon.
Mais un jour, alors qu’il devait être avec elle, la jeune fille se fait violée. Détruite par cet événement, elle vit prostrée chez elle, refusant même de voir son ami Kinjiro.
Se sentant coupable, le garçon va tout faire pour la faire sortir de chez elle, la sortir de son état. Il a même pris la résolution de ne plus se battre.
Et si la solution pour la faire sortir de son mutisme était qu’il devienne un grand spécialiste de l’humour ? A ceci près qu’il n’est pas drôle et ne semble pas être fait pour ça. Mais avec l’aide de la timide Yayoi, il compte bien être la prochaine étoile montante de l’humour.
Dès les premières bases, on voit toute la singularité du mangaka au travers d’un scénario original de par le héros, ses motivations et le choix de ce type d’humour comme pilier. Mais en plus de ça, le récit alterne régulièrement entre des aspects plus dramatiques et touchant, avec des moments de pure comédie. Ce mélange presque paradoxal, couplé à un rythme soutenu, donne vraiment beaucoup de personnalité et de profondeur à ce titre.
Les événements qui touchent Kuriko sont poignants. En peu de pages, Osada parvient bien à faire comprendre à ses lecteurs l’impact de cet événement sur la vie des deux amis et comment la jeune fille en vient à se cloîtrer chez elle et à couper toute relation sociale. On voit à quel point ce viol l’a détruite et toute la phase compliquée de restructuration que cela implique. Pour autant, le mangaka ne verse pas dans le larmoyant, sans pour autant minimiser l’acte. On sent bien la volonté de s’appuyer sur cet épisode tragique pour mettre en avant Kujiro et son humour.
Comme je l’ai précisé auparavant, l’humour est le point central de ce manga. Mais attention car ici c’est de l’humour assez spécial, très japonais. En effet, l’humour, ici, ne consiste pas en de l’humour de situation, des sketchs, du one-man show ou autre. Non ici c’est de l’humour basé sur les mots : jeux de mots, contresens, du loufoque…
Le principe est simple et se pratique avec une ardoise et un stylo. Il y a une situation donnée qu’il faut compléter avec humour.
Voici un exemple : la base est « Je ne vais plus chez mon coiffeur car… » A partir de là il faudra compléter avec quelque chose de drôle comme « Car je suis chauve ». Donc c’est très spécial et c’est un type d’humour qu’on ne pratique pas en France. Et pour le coup, ça ne fait pas forcément mouche. Personnellement, j’ai eu du mal à accrocher à ce style d’humour. Même si j’ai souris quelques fois, ça n’a jamais été l’explosion de rire. Pourtant, je reconnais qu’il y a quelques bonnes trouvailles, mais ce n’est pas mon type d’humour.
Néanmoins, il s’agit qu’un des ressorts humoristiques du titre et malgré une certaine distance culturelle, les personnages et l’ambiance font que c’est un régal à lire. C’est barré, plein de dynamisme et plein de créativité.
Graphiquement, le trait reconnaissable de Yuko Osada va bien avec ce genre de titre. Ce n’est certes pas le plus détaillé, ni le plus fin, mais il reste très plaisant. Cela doit notamment beaucoup au charadesign des personnages, à leur expressivité et les « bouilles » de Yaokin. De plus, son style est très dynamique, renforcé par un découpage incisif.
Pour conclure, Kid I Luck – tome 1 de Yuko Osada est un titre encore à part, plein d’originalité et de personnalité. Partant sur une base dramatique, il parvient à insuffler plein de bonne humeur et de fraîcheur, sans oublier le fond plus dur qui sert de socle. Le scénario est surprenant et place l’humour sur le devant de la scène. Le problème c’est que c’est un type d’humour un peu particulier, très japonais, et qui ne fonctionne pas toujours pour nous, lecteurs occidentaux. Les blagues et jeux de mots sont parfois très bons, d’autres fois moins, mais sans vraiment totalement convaincre. Et paradoxalement, malgré ça, j’ai trouvé que ce Kid I Luck fonctionne bien. La faute au style pêchu d’Osada et à son personnage principal attachant, maladroit mais persévérant.
Même si j’ai un peu de mal avec les épreuves d’humour, paradoxalement, j’ai été conquis par ce titre dans la lignée du style Osada. Avec seulement 3 tome, il serait dommage de se priver de sa lecture et de toute l’énergie qu’il dégage. Une bonne occasion de s’intéresser à ce mangaka pétri de talent.
Et vous qu’avez-vous pensé de ce seinen ? Trouvez-vous aussi que l’humour est étrange et peut-êre trop japonais ?