Comment faire un article qui ne fasse pas des kilomètres pour parler de GTA 5 ? Ça va être compliqué, mais je vais essayer d’être succinct : Ce jeu est un des plus grands jeux au monde !
Voilà… un peu moins succinct ? Bon, ok, on détaille…
Alors disons le tout de suite, même si j’ai toujours considéré Rockstar comme de très grands développeurs, je n’ai jamais été totalement conquis par un GTA, et je n’en ai même jamais fini jusque-là. J’ai beaucoup joué à GTA3, mais la ville tentaculaire et les missions de course poursuite ont eu raison de ma capacité à me repérer. J’avais l’impression d’être sans cesse perdu dans ces rues et j’ai fini par décrocher malgré les évidentes qualités. GTA 4, j’y ai joué une quinzaine d’heures et même constat. Le personnage principal était cependant très intéressant, mais les missions difficiles et énervantes au possible car sans checkpoint (obligé de se retaper des dizaines de minutes à chaque mort, parfois) m’ont fait arrêter rapidement.
Heureusement, il y a eu Red Dead Redemption… œuvre magistrale sur tous les points qui est largement dans mon top 5 des meilleurs jeux de tous les temps, et qui approfondissait les mécaniques et la narration de ce style de jeu à un niveau inégalé.
Et voilà GTA 5 (que j’ai fait sur PS4 qui plus est, histoire que les graphismes soient bien classes), qui a pris le temps d’apprendre de ses erreurs passés et qui s’est nourri des qualités de Red Dead Redemption pour sublimer le genre. Et histoire d’en rajouter une couche, Rockstar nous sert même 3 histoires parallèles entremêlées avec talent. Forcément, ça ne pouvait être qu’une réussite !
Nous suivons donc la vie de Michael, Franklin et Trevor.
Michael est un ex braqueur de banque à la retraite, en pleine crise de la quarantaine, désespéré par sa vie creuse dans une maison de luxe, avec des gamins pourris par la société et une femme qui préfère baiser avec ses profs particuliers plutôt qu’avec lui. Une vie face à laquelle il a de plus en plus de mal à contenir ses crises de colère.
Franklin est un black issu du ghetto, élevé dans les gangs où il a appris la loi du plus fort et oublié toute notion de légalité. Pour avancer dans la vie, il faut prendre ce qu’on a besoin ou envie d’avoir, et en assumer les conséquences. Mais les vols de voiture rapportent peu et il aspire à monter plus haut dans la chaine alimentaire.
Trevor, lui… c’est un cinglé de première ! Un redneck crasseux vivant dans une caravane délabrée au fin fond du désert, hurlant sous la lune au milieu des coyotes, et étripant les gangs de motards du coin pour agrandir son territoire de dealer, ou simplement quand l’envie lui prend de flinguer des mecs. Hors normes, il n’accepte aucune limite posée par une société qu’il renie. La morale, on s’en fout. Dans la vie, il faut faire ce que l’on veut, et fuck the world ! Quitte à y perdre une partie de sa santé mentale…

Trevor résumé en une image : du sang partout sur des fringues dégueulasses, devant sa jeep sur laquelle il a accroché le nounours qu’il aime… passionnément.
Et la vie de ces trois personnes va se télescoper (avec un passif et des événements que je ne vais pas détailler, car leur découverte est un plaisir énorme), avec une alchimie parfaite lors de braquages jamais osés, mais aussi avec fracas dans un quotidien qui part en vrille de tous les côtés. Police, FBI, Militaires, Milliardaires véreux, flics ripoux, gangs, anciennes et nouvelles connaissances… les enjeux et pressions vont se multiplier de façon exponentielle, manipulant nos trois héros contre leur gré jusqu’à les pousser à bout dans une conclusion grandiose ! L’histoire est palpitante de bout en bout, et racontée avec une étonnante clarté. Les missions arrivent à s’enchainer correctement malgré la possibilité de passer d’un personnage à l’autre quasiment quand on le souhaite, et de nombreuses missions que l’on pensait secondaires, vont avoir clairement leur importance dans la trame principale.

mission mémorable où l’on poursuit en moto un avion en train de se crasher ! la course-poursuite trop classe, quoi !
Et d’ailleurs, il est agréable de noter que chaque mission secondaire, tertiaire et même les activités les plus anecdotiques sont introduites et motivées par des cinématiques posant des enjeux et une motivation certaine. (Comme quoi, c’est tout à fait faisable, hein, Ubisoft ! Ouais, ouais, cache ton watch dogs, t’as raison !) Et grâce à cela, on a la réelle sensation de suivre la vie de ses trois personnages riches et complexes, impeccablement joués, et attachants de par tous leurs défauts.
Car oui, les personnages ne sont pas des héros, loin de là. Ils sont des clichés ambulants de ce qui ne va pas dans notre société, et le jeu nous les dépeints de façon cynique et crue, sans aucun artifice ou pudeur, et surtout sans jugement. La morale du jeu, c’est à nous de nous la bâtir, on ne nous enferme pas dans un manichéisme banal, on nous laisse notre libre arbitre.

La première fois que Franklin cambriole une famille de riches, il y découvre un fils ado qui crie des insanités devant son jeu vidéo de guerre, une fille ado qui putasse au téléphone avec sa copine, et une mère de famille en train de se faire peloter par son prof de tennis dans la cuisine… et quand Franklin les surprend, le mec s’écrie apeuré « oh my god ! a Black ! »… cynisme et critique de la société sou couvert d’humour, du grand Rockstar !
Et c’est là que tout le génie de Rockstar éclate et est incompris par le grand public. La surface visible du jeu est acide, clichée, cynique, perverse, honteuse… évidemment, puisque c’est une représentation exacerbée de notre monde. C’est une critique de ses défauts. Mais c’est en jouant ces personnages, en incarnant la folie humaine que l’on crée son propre jugement (au lieu de bêtement répéter ce qu’on nous inculque dans la vie réelle sans même le comprendre). Et ce jugement est sans appel, on aime nos personnages et on trippe avec eux sur de nombreuses choses, mais jamais leurs actes barbares et amoraux ne sont encensés. Jamais le jeu ne glorifie le mal. Il est juste honnête et implacable, et c’est au joueur de faire le reste. Et c’est une belle preuve de respect et de maturité qui rappelle à quel point le jeu vidéo n’est plus qu’un jouet pour enfant, mais bel et bien un média mature et intelligent qui peut marquer les esprits et aborder des thématiques magnifiquement complexes.
Le point féminisme : Dans la même lignée que les défauts énoncés ci-dessus, GTA exacerbe également la sexualité. Les gens frivoles baisent à droite et à gauche, les gangsters élevés dans un monde de domination fréquentent les clubs de strip teases et se tapent des prostituées, et Trevor, lui, baise tout ce qu’il a envie de baiser. Donc là encore, le jeu sera vu par les profanes comme un jeu sexiste et vulgaire. Et là encore, c’est une grosse erreur. La critique est toujours présente, et le monde patriarcal dans lequel évoluent nos héros est lui aussi critiqué justement en mettant en avant l’objectification des femmes, la sexualité marchandée ou forcée, et autres dérives dégradantes pour la femme.
Tout est permis au joueur, mais jamais glorifié une fois encore. On joue un instant au pervers, manette en main, oui, vu que c’est permis, mais bien vite la vision déplacée des femmes va rejoindre le jugement global que l’on se fait du monde, à savoir surtout du négatif.
Je n’irai pas pour autant jusqu’à dire que le jeu est féministe, non, (encore qu’il fasse plus de bien que la majorité des jeux, à mon sens) car si le background est efficacement géré dans l’ironie et la dénonciation, la femme n’est absolument pas représentée en premier plan. Si le prochain GTA choisit à nouveau la voie des héros multiples, il serait agréable qu’au moins l’un deux soit une héroïne ! (et par la même rajouter des prostitués homme, se serait cool !) Parce que là, tout dénonciateur qu’il soit, on reste clairement du point de vue masculin, dommage.

Une activité de Trevor consiste à massacrer des hipsters… histoire de passer le temps et de défouler ses instincts sanguinaires, quoi…
Pour ce qui est du gameplay, le constat est globalement positif aussi. La jouabilité est plutôt bonne, une fois accoutumé à l’inertie particulière des personnages, et à l’utilisation de certains boutons. Les personnages ont un nombre d’interactions assez incroyables, d’autant que les commandes sont réadaptées selon les situations ou les véhicules empruntés. Ainsi, piloter un hélicoptère ou un avion nécessitera un apprentissage réel qui pourra dérouter un peu au début, mais devient terriblement gratifiant au fur et à mesure que l’on gère les choses. Les voitures, camions, vans, motos, procureront également des sensations très différentes, et nos préférences se font vite sentir.
Les gunfight sont par défaut assistés dans la visée, ce qui n’est pas plus mal car il permet de se concentrer sur les possibilités de level design plutôt que sur les seuls skills de visée. Les armes sont également nombreuses et agréables niveau sensations, et les situations rencontrées durant les missions sont extrêmement variées et mettent tour à tour en avant chaque possibilité de gameplay pour une expérience vraiment riche. Mention particulière aux braquages que l’on va organiser durant l’aventure. Monter le coup, choisir l’approche, réunir le matériel, les véhicules et l’équipe, tout est réellement fait par le joueur,ce qui crée une attente intense et un exutoire génial quand le braquage se déroule comme on le souhaite. On n’est pas simplement spectateur, on est vraiment acteur.
La richesse, c’est vraiment ce qui caractérise le jeu, d’ailleurs. Rien que niveau activités, les possibilités sont énormes : tennis, golf, triathlon, plongée sous-marine, parachutisme, etc… et on ne parle pas de feature rigolote à faire une fois et à oublier, non, certaines, selon vos goûts, peuvent réellement vous occuper des heures, proposer des challenges excitants ou de la collectionnite aigüe. Et si elles fonctionnent, c’est parce qu’elles sont peaufinées avec un souci du détail impressionnant. Rien que la plongée sous-marine, wahou…
D’ailleurs en parlant de Wahou, parlons graphismes. J’ai été déçu… pendant 5 minutes. Car oui, les personnages en eux-mêmes bien que correctement modélisés ne sont clairement pas à la pointe de la technologie (rien à voir avec un last of us, par exemple), et leurs vêtements ont des rendus assez simplistes. Mais c’est quand la ville se dévoile dans son entièreté que la claque survient ! Quelle ville, putain !

Les ordinateurs ingame ont un accès internet, alors Rockstar a crée un internet, avec ses pages web, ses articles, ses pubs, etc… et si on clique sur la pub d’un nouveau dessin animé en streaming, on peut en voir le dernier épisode de 20mn intégralement ! Prétexte évidemment à une satyre absolue et débridée des médias ou de la société. (ici, les super-héros du Puritanisme américain !)
Et pas à coup de surenchère de taille, non, la ville n’est pas immense en soi, mais justement ! Rester modéré a permis de rendre chaque rue, chaque quartier tellement magnifique et vivant. On n’a de cesse d’être ébahi par les activités des gens autour de soi. Toute la ville fourmille de choses passionnantes, une course poursuite de flic qui nous passe à côté, une ambulance coincée dans les embouteillages, un vol à la tire, des gens affairés à leurs activités et qui ne se contentent pas de marcher sur un trottoir en boucle. Jamais une telle sensation de ville vivante n’a été atteinte dans un jeu vidéo, c’est indéniable. Et c’est par cette multiplicité que la technique est époustouflante… un soleil couchant, un orage, les lumières dans la nuit, tout ce monde autour de soi se retrouve magnifié à mesure qu’on le traverse, et il en résulte des points de vue tellement grandioses.
Et la gestion de la mer est la plus impressionnante que j’ai jamais vu ! Là où la majorité des jeux ne représentent qu’une surface sur laquelle le personnage allongé va avancer en battant des pieds, GTA nous offre une mer palpable, dont les vagues semblent terriblement naturelles, et où le personnage peut s’enfoncer pour en explorer tout le monde sous-marin… on a vraiment l’impression unique de ressentir la masse de l’eau, et ça c’est génial ! Oui, GTA 5 est un jeu magnifique visuellement et vous scotchera plus d’une fois à votre écran.

Et le reste de la map (60% est hors ville) est composée de déserts, de bidons villes crasseux, de montagnes… ça aurait pu être pauvre visuellement et c’est aussi riche et beau que la ville !
Et je parle, je parle, et l’article succinct l’est de moins en moins ! Je vais donc m’arrêter d’approfondir, nous avons vu les grandes lignes et passer à la strate inférieure engloberait tant de richesses à décrire qu’il me faudrait le double de l’article. Le reste, c’est donc à vous de le découvrir si vous ne l’avez pas encore fait.
Que ce soit pour se faire un réel avis (et non pas juste répéter ce que les infos en décrivent superficiellement), ou parce que vous êtes un amateur de bon jeu vidéo, GTA5 doit être fait dans une vie de gamer, et il mérite amplement son titre de jeu vidéo le plus vendu au monde. Car si de nombreux jeux peuvent prétendre à le battre sur des aspects précis, il n’en est aucun qui regroupe une telle richesse avec une aussi grande qualité sur tous les fronts.
