
THE MAN WHO STOLE THE SUN
Quittant soudainement la production de l’adaptation live d’un futur gros blockbuster nippon, Attack on Titans, le réalisateur Tetsuya Nakashima est réapparu quelques années plus tard avec un projet inattendu, surprenant, détonnant. Qui marque son retour vers un cinéma plus pop, plus coloré, très loin de son précédent film, Confessions, terriblement glacial.
The World of Kanako tranche avec le reste de la production cinéma japonaise, allant jusqu’à jouer et tourner en dérision certains codes pour mieux les interroger. Un film de mauvais gosse qui lève gentiment son majeur à l’attention d’une industrie rongée par l’obsession de donner aux consommateurs ce qu’ils veulent. Ainsi, exit les pauses contemplatives pour un public en mal d’exotisme, exit l’énième regard sur la dislocation de la famille japonaise, exit le fantasme de romances lycéennes… Ici, tout le monde est pourri, chacun participe au glauque ambiant. Tout. Le. Monde.
TROP MIGNON !
L’histoire se concentre sur un ex-flic divorcé et alcoolo (Koji Yakusho, impérial) qui enquête sur la mystérieuse disparition de sa fille adorée. Le réalisateur prenant le parti-pris de nous plonger totalement dans l’errance de cet homme, violent, méprisant, désabusé, perdu… Qui essaye de maintenir un semblant d’apparence, entre ses habits blancs et sa belle voiture, mais reste incapable de duper quiconque autour de lui. Un type enfermé dans sa propre déchéance et totalement aveugle à lui-même.
Dans sa structure, l’enquête du père se retrouve compléter par les flashbacks d’une amourette d’un lycéen naïf, des flashbacks qui renvoient à l’état d’esprit du père tout en dressant un peu plus précisément le portrait de la jeune fille. Et bien sûr, Nakashima détruit aussi bien le fantasme de la vie lycéenne que de la rigueur de la vie adulte. En explorant le contraste entre les apparences — ambiance légère — et la réalité — manipulation, violence. Mais, malgré le rythme intense, le film parvient aussi à faire du surplace, rappelant la tendance du cinéaste à surexpliquer les intentions — l’amourette vraiment injuste, la déchéance vraiment crade.
DE BRUIT ET DE FUREUR
Il règne sur le film une ambiance de polar des années 70, alignant des personnages brisés sans signe de rédemption, dans un monde torturé et violent. D’une certaine manière, ce projet semble synthétiser les frustrations artistiques de Nakashima — les restes de son expérience ratée sur l’adaptation d’Attack on Titan ?
Un choc esthétique et thématique de la part du Japonais, imparfait certes, The World of Kanako vient nous rappeler qu’il reste encore des cinéastes couillus au Japon, des créateurs capables de taper sur tout ce qui bouge, sans concession.