Une série culte qui malgré une trop grosse répétitivité a marqué un tournant lors de la sortie de son premier volet. Parcourir des faits historiques dans la peau d’un personnage trop classe, caché dans l’ombre, qui assassine par surprise ou se bat contre une foule d’ennemis, sur un fond de complot mystique à travers les âges.
Une série qui s’est envolée avec un second volet qui frappera encore plus fort sur tous les niveaux et nous fera admirer des villes italiennes immenses du haut de leur clochers, en vivant la vie d’Ezzio, beaucoup plus charismatique que son prédécesseur, Altaïr.
Et une série qui se mettra à s’allonger, s’allonger, dans une descente d’intérêt semblant couler le navire. Et pourtant, seuls quelques défauts mineurs entachent les volets 3 et 4, mais la grosse erreur a été de vouloir étaler la vie d’Ezzio sur une trilogie. Une vie qui n’en méritait pas tant et qui se retrouve étirée jusqu’à la trame, perdant au fur et à mesure tout intensité et amenant un ennui profond au moment des pseudos-révélations censées clôturer cette épopée. Autant dire que l’annonce d’un nouveau héros, sur un continent différent, et avec un gameplay différent avait de quoi enfin émoustiller un peu. Connor est le nouvel assassin que nous allons suivre.
Une aventure épique en demi-teinte
0.Et quelle surprise de commencer ce Assassin’s Creed 3 dans la peau d’un certain Haytham, effectuant une mission apparemment importante au nom de la liberté, action d’adieu au monde où il est né. Il embarque juste après sur un bateau voguant vers les Etats-Unis, récemment colonisés, pour empêcher les hommes vils d’asservir cette nouvelle terre encore fragile et prise au dépourvu. Et ce n’est qu’après quelques péripéties dans la peau de ce personnage qu’il cédera la place au jeune Ratohnhaketon , Indien d’Amérique dont la mère est tuée par les Anglais, et qui va être élevé par Achilles, un homme mystérieux vivant reclus dans un vieux manoir. Ce dernier, ayant œuvré jadis au sein des Assassins, va inculquer son savoir au jeune indien, pour lui transmettre la volonté d’aider le monde et de combattre les Templier. Il va également lui offrir un nom civil : Connor. Ainsi, après presque un tiers du jeu, commence le gros de notre aventure.
Le background, dont je tais volontairement de nombreux aspects, est très complet et propice à faire évoluer des personnages intéressants et travaillés. Et de ce fait, les scènes intenses sont nombreuses, à l’image de la traversée d’Haytham vers le nouveau continent… un voyage en bateau où les rencontres avec l’équipage, le capitaine et un début de mutinerie seront l’occasion de multiples moments de vie très addictifs. Les débuts de chasseur du jeune héros seront également immersifs à souhait, au fil des buissons de la forêt touffue. J’ai également particulièrement aimé les interactions avec les habitants du domaine d’Achilles qui, au fil de nombreuses missions secondaires parfois anecdotiques ou plus importantes, créeront un vrai esprit de communauté. Une grande famille que l’on aime côtoyer quand on repasse par chez nous. En fait, on se croirait à Walnut Grove, dans la petite maison dans la prairie. Chaque mission est un épisode de la série et c’est un petit plaisir nostalgique que de les vivre.

Bienvenue à Walnut Grove où tout le monde vit heureux… mais, toute cette neige ! Bon sang, Caroline, les récoltes !!
Il y a également des thématiques très intéressantes dans le récit. La naïveté de Connor, élevé dans un peuple ignorant la guerre et la perfidie des hommes civilisés, va être constamment prise comme cible de toutes les manipulations. Patriotes comme envahisseurs tenteront de l’utiliser et il tombera plus d’une fois dans le panneau avant d’apprendre à être moins idéaliste.
Les Assassins et les Templiers sont également traités avec bien plus de complexité que d’habitude. Ne se contentant pas de la notion de bien et de mal, chaque camp a des motivations qui méritent l’attention et laissent le doute dans l’esprit de Connor comme du joueur.
Et enfin, la relation entre Connor et Haytham est très intéressante même si leurs interactions n’arrivent que tard dans l’histoire.
Mais malheureusement, la majorité des cinématiques ou des discussions ingame sont mal écrites et tombent à plat. Manque de rythme dû à des dialogues trop banals ou tout simplement à des blancs beaucoup trop longs laissés entre chaque tirade… le résultat casse complètement les sentiments qui tentent de naître entre le joueur et son avatar. Le destin de Connor est pourtant captivant sur le papier, mais complètement fade une fois joué devant nous. Dommage, il avait de quoi devenir plus mémorable qu’Ezzio, il sera bien vite oublié, au final.
Enfin, il convient de saluer le fait que Desmond, dans le monde réel a enfin droit à des interludes intéressants et dépaysants. Finies les déambulations dans des mondes de cubes chiants comme la pluie, il va enfin passer un peu à l’offensive contre Abstergo et monter au créneau dans des lieux variés comme un building en construction, une station de métro bondée de monde, un stade de football ou encore la tour Abstergo elle-même. Un petit souffle d’air frais qui nous ferait presque enfin apprécier ce personnage s’il ne retournait pas à la moindre occasion dans les discussions prises de tête avec les fantômes de la civilisation passée. Cet aspect de l’histoire ne débouchant en plus que sur un un final plutôt plat et sans saveur, nous faisant miroiter un réel choix moral qu’on ne nous laissera pas effectuer. Pas vraiment d’intérêt dans cette conclusion.
Un monde magnifique… vu de près !
Alors que les tests un peu partout sur le net vantent une qualité graphique de haut niveau et que les trailers alléchaient les babines, je suis tombé de haut à ma première montée sur un point d’observation, à Boston. Habitué à assister dans ces moments-là à des panoramas somptueux, j’étais abasourdi de voir des bâtiments noyés dans un brouillard épais cachant les détails de la ville. Une technique qui a toujours été utilisée sur les arrières-plans, bien sûr, mais pas à si peu de distance. Et surtout, un fait absolument scandaleux : passé la quinzaine de mètres autour de nous, le décor n’affichait que les surfaces 3D de l’environnement, couvertes d’une couleur monochrome selon l’objet (vert pour l’herbe, marron pour les bâtiments, etc…). Pas une texture ne se charge là où notre regard porte, juste un décor digne d’un mauvais Wow-like en ligne.

c’est loin d’être le pire panorama, mais on distingue l’herbe résumée à du vert… et un brouillard énorme alors que d’en bas, on en voyait pas…
La cause à cela ? Un clipping monstrueux faisant apparaître les détails du monde qui nous entoure à une distance ridiculement petite. Sérieux, je n’ai pas souvenir d’avoir vu un clipping pareil sur PS2 ! Lorsque l’on court à travers champs, on voit l’herbe pousser à quelques mètres devant nous, les PNJ apparaissent par magie et les soldats tentent de vous arrêter parce que vous leur avez foncé dedans alors qu’ils étaient invisibles, car pas encore chargés. Les zones de couleurs du décor se remplissent enfin d’une texture leur donnant vie et les ombres des arbres donnent enfin un peu de volume… mais pour cela, il a fallu aller juste devant.
Outré par une aberration pareille, je n’arrivais pas à comprendre les notes des testeurs face à tout ça. Le reste du jeu m’a fait réaliser qu’il ne s’agissait pas de bugs ou de manque de finitions mais bel et bien d’un choix des développeurs. Ils ont augmenté les détails de près au-delà des limites techniques des machines, tout simplement parce que le plus gros de l’aventure se passant dans des forêts épaisses, on peut assister à 90% du temps à un visuel tout simplement époustouflant. Courir à travers les arbres, les ruisseaux, les rochers ou encore naviguer sur l’océan sont des délices visuels, je ne peux que l’avouer. De plus, la météo est interactive et transforme les décors sous la neige, ou par les bourrasque d’une forte tempête.
Alors que penser de ce choix ? J’avoue ne pas être fan de sacrifier ainsi les panoramas de ville qui étaient une marque de fabrique de la série, mais je dois reconnaître que c’était dans un but louable. Alors admettons…
Cependant, on ne peut pas excuser l’avalanche de bugs qui pourrissent littéralement le jeu ! On était habitué à des aléas dans les mouvements automatiques du personnages sur le décor, mais là, absolument TOUT est archi-buggé !
Des gens et des animaux disparaissent sans raison devant nous, la cinématique de début de jeu et de fin n’ont pas de voix (pensez à activer les sous-titres avant de commencer, sinon vous ne comprendrez rien), on peut interagir avec des objets à travers des murs (on se fait aussi repérer par des gardes à travers les murs, parfois), certains PNJ continuent leurs actions pendant des cinématiques (on peut se faire bouffer par un loup tout en discutant avec quelqu’un ou passer à travers une garnison en papotant), des musiques diverses apparaissent sans raison dans les menus, le mode visée se bloque, chasser la biche est plus facile en la poursuivant en attendant qu’elle bugge contre un arbre, et certaines missions verront un objectif bloqué vous obligeant à un redémarrage. Pour vous donner un ordre d’idée, on assiste facilement à plus d’une dizaine de bugs à la minute dans certaines zones, il me faudrait des dizaines de pages pour recenser tous les problèmes que j’ai rencontré.
Vous voulez un petit exemple concret ? En arrivant à New York, des icônes de missions secondaires d’aide aux habitants sont disséminés sur la carte. Je me rend à l’une d’elle, face à un homme et j’appuie sur rond comme c’est proposé. Je vois mon personnage incendier les couvertures du pauvre gars qui me crie « héé, mes couvertures, pourquoi vous faites ça ? »… Je réponds que ces couvertures sont contaminées et répandent la variole. Je ne savais pas que la vision d’aigle des assassins permettait de déceler les bactéries, mais bon. Je me rend à un autre point de mission, et un homme blessé me demande de l’emmener chez un docteur. Je le prend dans mes bras, m’obligeant à avancer doucement et l’objectif est à plus de 200 mètres… un long moment à le trimballer en subissant le fait qu’il avait buggé et prononçait des « mmhmmh » toutes les secondes ! Une fois enfin arrivé à l’objectif indiqué, je veux le déposer sur un lit, et Connor dans la foulée incendie ce même lit avec le gars dessus, en annonçant que ces couvertures étaient contaminées… L’objectif avait en fait buggé et s’était mis sur l’icône d’une autre mission secondaire. Je récupère donc l’immolé qui n’a rien senti et le vrai objectif apparaît enfin à 10 mètres du point de départ… m’obligeant donc à refaire 200m dans l’autre sens accompagné par les « mmhmmh » du mec. Raaaah !!
Voilà en gros le genre de moments agaçants que vous devrez affronter parfois plusieurs fois par heure en essayant de conserver votre calme et votre envie d’éteindre le jeu. Très franchement, j’ai sérieusement eu envie de laisser tomber AC3 et de passer sur un autre jeu, chose très rare chez moi, mais là, sérieux, ça faisait envie. Heureusement que beaucoup d’autres qualités ont réussi à me redonner envie de continuer l’aventure, mais une telle quantité de bugs est totalement inacceptable, surtout plusieurs mois après la sortie (les DLC payants sortent en temps et en heure, eux, alors il serait bon de répondre présent pour des patchs correctifs bien plus nombreux!)).
Chasse, guerre, piraterie et compagnie
Les missions qui composent le scénario sont plutôt variées et nombreuses. Infiltration dans des camps ennemis, espionnage, baston, assassinats bien sûr, mais aussi quelques nouveautés comme la chasse ou la navigation.
Les animaux sont nombreux dans les forêts entourant Boston et New York, et chaque bestiole peut être chassé pour récolter des fourrures et autres trophées revendables au commerçant du coin. Et en bon indien que l’on est, la chasse devrait être un moment de traque silencieuse, eh bien, à part si vraiment on cherche les complications, non. Les parties de chasse vont bien vite se résumer à des affrontements directs avec les animaux à base de QTE bien difficiles à rater, ôtant toute hésitation à foncer dans le tas. Deux boutons pressés et hop, un loup tué… répétez l’action une dizaine de fois d’affilée pour vous défaire de l’attaque d’une horde menaçante. Un très mauvais choix de gameplay qui videra cet aspect de toute motivation pour le joueur.
Connor a pourtant un arc, me direz-vous, on peut donc chasser à distance ? Oui et non… car les flèches ne peuvent être décochées qu’à une distance maximum bien trop proche de la cible pour espérer la prendre efficacement par surprise. Et pour ce qui est de faucher la cible en pleine course oubliez tout de suite cette option, car attribuer l’arme à distance au bouton triangle est d’une bêtise à pleurer. Messieurs les développeurs, pourriez-vous m’expliquer comment viser une cible en mouvement avec le joystick droit et utiliser le bouton triangle en même temps au moment adéquat… avec le même pouce ? C’est pas pour rien que tous les FPS du monde utilisent les gâchettes pour l’arme, bon sang !

Holà, matelot, trouvons donc ce fameux Jack Sparrow, je dois lui acheter des places pour DisneyWorld…
Heureusement, ils se sont rattrapés avec les affrontements en mer qui constituent au final la meilleure nouveauté de cet opus. Dans le rôle du capitaine du navire, les sensations en haute mer sont géniales. La houle sous les intempéries est parfaitement retranscrite et naviguer vers un soleil couchant au milieu des îlots des Caraïbes est une vraie carte postale. Et quand viennent les vaisseaux ennemis, on ordonne les tirs de canon, tout en guidant le bateau et en choisissant son allure via la voile plus ou moins ouverte. On peut soit viser dans tous les angles avec le canon à pivot, petit mais précis, soit manœuvrer pour avoir sa cible sur le flanc et ordonner une salve de toute l’artillerie. On pourra également upgrader le bateau contre monnaie sonnante et trébuchante, et obtenir des boulets incendiaires ou encore des boulets enchaînés permettant de briser les mâts du navire adverse pour l’immobiliser. Cette dernière action permettra dans certaines missions d’aborder le navire dans la plus pure tradition pirate pour un combat au corps à corps contre l’équipage. De vrais bons moments de jeux, efficaces sur tous les plans.
On rajoutera à tout cela de nombreuses missions secondaires faisant avancer des minis histoires, mais nombre d’entre elles seront complètement bâclées une fois de plus. Vous serez bien souvent guidés sans raison par un symbole sur la carte vers un homme qui vous dire juste « merci » et fera afficher des cibles à abattre dans la ville. Au joueur de supposer que l’homme en question nous paie pour abattre certains hommes… pourquoi ? On en saura rien, pas le moindre dialogue d’immersion pour créer une atmosphère.
C’est comme les missions des frontaliers qui avaient un potentiel vachement sympa ! Des voyageurs au coin du feu se racontent des légendes urbaines mystérieuses et Connor va enquêter pour trouver le fin mot de l’histoire. C’est intriguant, ça émoustille l’intérêt, mais ces missions se déroulent en une succession de points à rejoindre souvent sans raison particulière pour avoir une phrase « mystère éclairci » qui s’affiche à l’écran face à un objet. Si vous voulez mieux comprendre le pourquoi du comment, il vous faudra aller lire un paragraphe dédié dans le menu des archives. Du travail bâclé une fois de plus.
En fait, sur bien des points AC3 rappelle l’excellent Red Dead Redemption… mais en moins bien. Car ce dernier avait rendu la chasse passionnante, les contrées splendides à perte de vue et les histoires de chaque PNJ croustillantes comme des potins, immersives ou amusantes. Toute une ambiance, une aura, que Assassin Creed 3 n’a absolument pas réussi à créer.
Au final, faut-il conseiller ce jeu ? Oui, car il n’est pas mauvais en soi… mais il avait le potentiel d’être exceptionnel, ça en est malheureux. Il reste cependant une aventure dépaysante et intéressante si vous vous sentez de passer outre une narration plate et avec bien peu d’émotion et une avalanche de bugs totalement scandaleux. A vous de voir…
PS : inutile de faire un paragraphe sur le multijoueur qui est une copie conforme du précédent volet, qui était une copie conforme du précédent volet… sympathique, donc, mais vraiment sans surprise une fois la découverte passée.
le trailer est tellement prometteur en terme d’émotion, pourtant…
