Dans la vie d’un gamer de mon âge, il y a des jeux clés. Des jeux qui ont marqué toute une époque parce qu’ils inventaient un nouveau gameplay, parce qu’ils créaient une expérience nouvelle. Max payne fut l’un d’eux. A une époque où les FPS commençaient à s’installer comme meilleurs représentants des sensations de tir, Max Payne, avec un petit budget mais une idée révolutionnaire, a popularisé le bullet time. Une feature qui va faire un buzz immense dans les cours d’école ! On pouvait enfin faire comme dans Matrix ! Plonger au ralenti tout en vidant ses chargeurs ! La classe intégrale ! A tel point que depuis, les jeux intégrant ce gameplay sont légion, à commencer par Max Payne 2 qui reprendra la même recette en y mettant cette fois-ci de bons moyens.
Quand on a su que Rockstar allait faire renaître la licence 15 ans plus tard, l’attente fut palpable. L’univers sombre, mature, aux thématiques lourdes rentrait parfaitement dans les habitudes des développeurs. Et non content de reprendre la licence, ils se la sont appropriés.
Max se noie dans l’alcool, écumant les bars crasseux de New York pour oublier la mort de sa femme, les choses qu’il a dû faire, la corruption et le vice dans ce monde qui l’entoure. Et se mettant à dos la mafia locale, il accepte bon gré mal gré d’assurer la protection d’une famille riche à Sao Polo, histoire de prendre le large. Un boulot où il pourrait picoler en paix et sous le soleil. Mauvaise pioche car ladite famille va se retrouver au centre d’un sacré bordel. Police corrompue, complot politique, guerilla urbaine, mercenaires, trahisons, prises d’otage… le réveil est brutal quand on sent à nouveau que des vies dépendent de nous. Il est temps de laisser tomber le whisky et d’empoigner les armes.
Le scénario, bien que très classique et prévisible, est donc mené tambour battant. Peu de temps morts, une immersion importante, un cynisme tout aussi lourd et marrant à la fois, et les nerfs à vif. La musique est de bonne facture, les graphismes très détaillés et possédant une bonne direction artistique, et la mise en scène très engagée. Un peu trop même, car si l’écran découpé et les mots apparaissant à l’écran fonctionnent parfaitement, les dédoublements et autres grésillements d’image sont parfois un peu agaçants. Très intéressants dans les chapitres où Max est ivre mort, ou blessé, cela semble parfois un peu gratuit quand il avance, sobre et en forme dans un couloir. On a parfois envie de dire au cameraman de régler sa caméra une bonne fois pour toute. Mais pas de quoi gâcher le plaisir tout de même.

Quelques scènes scriptées offrent un ralenti dans une scène spectaculaire, histoire de dégommer quelques mecs dans une position improbable !
Mais Max Payne, c’est avant tout les gunfights, et ce qui est sûr, c’est que Rockstar n’a pas trahi l’original. La gestion de la jauge de ralenti est la même, et après un peu d’entraînement, on arrive à passer le plus clair de son temps à flinguer du méchant au ralenti, avec une classe impeccable, et mettant à l’honneur la localisation impressionnante des blessures sur les ennemis.
La seule chose qui m’embête, c’est qu’à part les bullet time, en terme de gameplay peaufiné, il n’y a rien d’autre. Pourtant, ça ne manque pas tant que ça, et puis à l’époque c’était pareil et ça nous allait très bien, certes, mais c’est tout de même un peu aberrant pour un jeu récent et des développeurs aussi talentueux, d’avoir volontairement renoncé à des choses évidentes comme le passage d’une couverture à une autre. Impossible par exemple de prendre un virage tout en restant caché, il faut se relever, passer l’angle du muret et se cacher à nouveau.

Impossible de jaillir de sa position pour se planquer de l’autre côté du couloir, comme dans tout TPS récent digne de ce nom… un choix étrange…
Pas de grenades pour tempérer son avancée ou de combat au corps à corps. Et malgré l’ambiance de certains passages, impossible aussi de se la jouer un peu infiltration. A n’y rien comprendre puisque certains chapitres nous mettent un pistolet à silencieux dans la main, mais la cinématique nous fait nous placer en plein milieu de la salle et l’IA nous repère alors même que les ennemis avaient le dos tourné.
Le feeling des armes est également perturbant, car il a été choisi de ne faire quasiment aucune différence dans les armes utilisées. Le pistolet aura la même précision parfaite que la mitraillette, ou le fusil d’assaut, ce qui motive peu à utiliser des armes différentes (autant prendre un M4 bien puissant et basta!), et crée des instants un peu étranges comme le fait de regarder impuissant le méchant s’enfuir avec l’otage à 15 mètres de nous en contrebas, alors que juste avant, on a tiré avec un simple pistolet sur une grenade en l’air pour la faire exploser !

Max change de look… ça ne vous rappelle rien ? Enlevez la barbe, rajoutez un peu d’humour et dites bonjour à John McLane !^^
A noter tout de même une ou deux très bonnes idées, comme le ralenti en cas de blessure mortelle qui nous laisse quelques secondes pour buter le tireur en question, récompensant la réussite par une prise de médoc instantanée et donc une survie. Ou encore le fait que si, alors qu’il a une arme à deux mains, Max empoigne son pistolet, il conservera le fusil dans l’autre main, lui interdisant de tenir deux flingues à la fois sous peine de devoir abandonner le fusil en question. Un petit détail réaliste qui a du charme.
Les défauts existent donc et rappellent pourquoi le jeu est passé de peu à côté de la célébrité. Il lui manque une profondeur, il lui manque des finitions. Mais au-delà de cette constatation de non-perfection, on doit bien admettre que Rockstar a bien maîtrisé le sujet, s’est réapproprié un univers avec brio, et nous fait sans problème passer de très bons moments, les flingues à la main. Et c’est bien ça le principal.
Rien que ces quelques notes de violon, et la nostalgie revient^^