Quantcast
Channel: Nanami.fr - flux général
Viewing all articles
Browse latest Browse all 14946

Le Chapelier Fou - Comment prédire un échec commercial ?‏

$
0
0

« Personne n’en a parlé ici, ça devrait donc logiquement faire un carton… » Cette phrase, prononcée à propos de Red Eyes Sword sur un forum spécialisé, pourrait faire sourire si, d’une, elle n’était le fait du directeur de collection de Kurokawa et, de deux, ne révélait pas une vérité troublante. Car sur le forum en question, nos éditeurs sont victimes d’une étrange malédiction : quand les membres aiment un titre, l’échec commercial n’est pas loin. De là à prétendre qu’une série que personne n’évoque se transformera en succès, il n’y a qu’un pas. Et effectivement, vous aurez plus de chance d’y entendre parler de Dorohedoro ou de Princesse Kaguya que de Fairy Tail ou de Secret Service, ce qui va dans le sens de la boutade ci-dessus.

Si ce forum pourrait donc, au premier abord, faire office de baromètre, il convient surtout de se demander d’où viennent les échecs commerciaux, et comment les anticiper.
Les éditeurs de manga ne sont pas idiots – ou du moins pas tous : ils savent pertinemment si une série a des chances de rencontrer le succès ou non, même si dans un marché en recul, ils risquent de se confronter plus souvent à de mauvaises surprises qu’à des bonnes.

Pour bien comprendre la situation, prenons le cas – parfaitement au hasard – de Ane no Kekkon, et étudions ses caractéristiques :
- Titre : incompréhensible
- Auteur : inconnue en France
- Catégorie : Josei
- Genre : Drame
- Jaquette : noir et blanc
- Âge des personnages : la trentaine bien tassée
- Promotion : inexistante
C’est bon, tu le sens ton gros échec commercial !? Je ne parle même pas de qualité du manga, car avant de pouvoir en juger, il faut déjà le lire. Or avec une approche aussi suicidaire, les chances de réussite de cette série étaient déjà de l’ordre du zéro absolu avant même qu’ils ne reçoivent pas le premier tome à temps pour Japan Expo.

J’estime que plusieurs éléments jouent dans l’échec commercial d’un titre, dont les principaux seraient son genre, son public cible, et la communication de son éditeur.
Parmi les genres qui semblent rebuter le lectorat français au point de disparaitre progressivement des rayons, je vois en particulier les suivants :
- La série sportive : Et c’est vraiment le cas que je ne comprends pas. Quand j’étais gamin, c’était un genre phare, Captain Tsubasa s’est apparemment bien vendu lors de sa première édition française, et alors qu’il repose sur des codes précis traditionnellement appréciés du lectorat, il a accouché d’un nombre impressionnant de fours ces dernières années, parmi lesquels Prince du Tennis et Dream Team, des accidents industriels que leurs éditeurs doivent bien sentir passer. Le seul qui semble s’en tirer correctement, c’est Kuroko no Basket, mais pour des chiffres qui n’ont strictement aucune commune mesure avec ceux que le titre réalise au Japon ; et encore, ce succès relatif s’explique avant tout par une adaptation animée récente et un lectorat largement féminin.
- Le Josei : Ok, ce n’est pas un genre. Pour le coup, c’est une catégorie entière qui peine à trouver son public, même quand les éditeurs la travestissent en « Seinen » ou en « Shôjo ». Quant à savoir pourquoi, cela vient peut-être d’un trait féminin mais associé à des thématiques et un traitement adulte. Il faut croire que c’est incompatible.
- Le Shôjo sortant de la comédie romantique en milieu scolaire : J’ai déjà évoqué le sujet à maintes reprises, mais cela fait toujours aussi mal.
- Les histoires de Furyo : Un genre japonais par excellence, mais apparemment trop.
Ceci n’est évidemment qu’un aperçu. Il y a certainement d’autres genres qui souffrent d’une situation similaire, et auxquelles je n’ai pas songé.

Du côté des publics cibles, j’en vois 5 principaux, classifiés de manière totalement arbitraire et caricaturale de ma part donc pardon aux familles tout ça :
- Le « Japan Expo » : Un lectorat composé d’adolescents et de jeunes adultes, qui recherchent à la fois un divertissement et des codes propres aux manga, qu’ils soient narratifs ou graphiques. Principal consommateur des Shônen à rallonge du Jump – qu’il sera plus tard le premier à conspuer – des publications Ki-oon de type Judge, et des comédies romantiques à l’eau de rose pour sa faction féminine ; laquelle, en manque d’action, se tournera vers le Shônen Girl ou le Shônen tout court. Apprécie les tendances mais peu l’originalité, et déteste par dessus tout les « vieux » dessins. Pour les éditeurs, c’est souvent ici que se font les ventes, et pour cause il s’agit du public le plus vaste.
- Le « Médiathèque municipale » : Un lectorat plus âgé, issu de la BD Franco-Belge, qui a longtemps regardé les manga avec dédain avant que Angoulême et Télérama ne lui fassent découvrir les auteurs classiques, des thématiques originales et exotiques – comme les bains – des scénarios adultes et ambitieux, voire une production avant-gardiste et des auteurs comme Suehiro Maruo. Par contre, les séries à rallonge codifiées pour gamins, ce n’est pas son truc. Ce public n’a pas l’air très fourni au premier abord, mais quand Jiro Taniguchi tire à 50.000 exemplaires, cela fait forcément rêver. Et puis, cela fait toujours bien auprès de certains médias.
- Le « Librairie spécialisée » : Le vieux de la vieille, lecteur de manga depuis 10 ans minimum voire depuis les années 90. Trop expérimenté pour se satisfaire uniquement de la simplicité et de l’exploitation de codes préétablis, trop porté sur le manga en tant que divertissement pour se contenter de la production alternative, et suffisamment conscient du potentiel de ce média pour ne pas se montrer exigeant. Bref, un lecteur chiant qui privilégie les titres destinés à ne pas se vendre, trop critique pour apprécier tout ce qui pourrait l’intéresser, et trop dispersé pour représenter une cible éditoriale viable. Son seul atout, c’est que nous en trouvons parmi les éditeurs, et que de temps en temps, il leur arrive de se faire plaisir.
- Les « Pokemon » : Les gamins. Ils apprécient les séries japonaises tronquées par les Américains et diffusées sur Gulli, leurs parents ont moins d’à priori négatifs sur les manga que n’en avait la génération précédente, et cela leur permet de constituer un lectorat nouveau pour les éditeurs, à force de combats de toupies et de petits chats mignons. Destinés à devenir des lecteurs réguliers.
- Les « Fujoshi » : Une secte à part très au courant de l’actualité, très spécialisée, et qui sait généralement bien avant sa sortie si un titre va fonctionner ou non. Limité en nombre mais fidèle, comme peu d’éditeurs visent ce public ils n’ont pas encore réussi à le saturer totalement et c’est tant mieux.
Et si tu n’arrives pas à identifier le bon public, qu’il n’est pas assez nombreux, ou que ta communication ne le touche pas, c’est échec et mat.

Enfin, reste justement la publicité. Là, c’est simple : avec ou sans, et plus ou moins poussée. Nous noterons toutefois que ce sont rarement les titres les plus risqués qui bénéficient du plus de publicité, comme si les éditeurs préféraient augmenter encore les effectifs d’un succès assuré plutôt que d’essayer de capter un nouveau public sur des séries plus difficiles à vendre. Ce qui peut paraitre comme un paradoxe : souvent, les éditeurs donnent l’impression de jeter un titre dans le vide sans élastique – comme Ane no Kekkon– et d’attendre de voir s’il réussit à survivre tout seul comme un grand. C’est rarement le cas. Toutefois, certains semblent doués pour imposer des séries plus atypiques, comme Kurokawa et Ki-oon, dont la spécialité m’apparait surtout comme leur capacité à cibler parfaitement leur public, et à adapter leur communication en conséquence. Prenons Bride Stories : le précédent titre de l’auteur, avec un sujet à peine moins hermétique, s’était planté ; c’était pourtant du Kurokawa, sauf que cela ne marche pas à tous les coups. De son côté, Ki-oon a su élaborer un plan judicieux et cela s’est concrétisé par des ventes plus qu’honorables.

Ce qui, au final, va conditionner l’échec d’une série, ce sera avant tout une conjugaison de ces éléments, avec d’autres plus ou moins importants selon les cas comme le dessin, la renommée de l’auteur, ou une éventuelle adaptation animée.
Si nous prenons le cas des classiques ; j’entends par là des titres datant d’avant les années 80, ou issus d’auteurs ayant eux-mêmes débuté leur carrière avant cette époque et dont cela se sent dans le dessin. Ceux-là auront à priori deux cibles potentiels : les « médiathèque municipale » et les « librairies spécialisées ». Sauf que cela dépendra du format : un classique publié comme n’importe quel manga, en plusieurs volumes simples de 192 pages, attira moins les « médiathèques municipales », qui privilégieront des albums plus épais et plus proches du A4 ; inversement, ce format attirera moins les « librairies spécialisées », d’autant plus que cela aura souvent une conséquence sur le prix. Sachant qu’un public compte plus d’acheteurs potentiels que l’autre, nous ne pouvons pas reprocher aux éditeurs de privilégier un format par rapport à l’autre.

Grosso modo, nous restons donc sur du cas par cas, mais il reste parfaitement possible, et sans jouer les oiseaux de mauvaise augure, d’estimer le devenir d’un titre sur le marché français.
Pour en revenir au forum cité dans mon premier paragraphe, nous y trouvons évidemment majoritairement des « librairies spécialisées », qui mettront en avant des manga qui pour eux le méritent, comprenez des manga apportant de la diversité au marché français ; là où une comédie romantique basique soit ne trouvera pas grâce à leurs yeux, soit n’aura pas besoin d’être mise en avant, sachant qu’elle a justement plus de chance de fonctionner qu’une série vendue en tant que manga mais trop datée ou trop originale. Involontairement, ils vont donc identifier les titres qui auront le plus de mal à s’imposer. Ainsi, je comprends l’auteur de la phrase qui me sert d’introduction : quand ils ne parlent pas d’une nouveauté, ce n’est pas bon signe concernant son originalité (supposée) mais une bonne chose pour son potentiel commercial.


Viewing all articles
Browse latest Browse all 14946

Trending Articles


FORECLOSURE OF REAL ESTATE MORTGAGE


OFW quotes : Pinoy Tagalog Quotes


Long Distance Relationship Tagalog Love Quotes


INUMAN QUOTES


Sapos para colorear


Patama Quotes : Tagalog Inspirational Quotes


5 Tagalog Relationship Rules


Re:Mutton Pies (lleechef)